Dokapon Kingdom Connect est la version remasterisée de Dokapon Kingdom (sorti en 2007 sur Wii), un singulier mélange entre RPG et jeu de société. Lui-même est un remake du jeu Dokapon 3-2-1 de 1994, qui était à l’époque une exclusivité Super Nintendo.
Ayant reçu des critiques assez mitigées de la part de la presse et des joueurs, le titre développé par Sting Entertainment a malgré tout su bénéficier du côté familial et du succès incontestable de la Wii pour se vendre plus que correctement. Il était donc assez logique que la licence ressurgisse d’outre-tombe pour finalement arriver sur Switch, dans cette version remastérisée. C’est l’heure de vérifier si les défauts de l’époque ont été corrigés et si le jeu en vaut vraiment la peine.
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Editeur(s) /
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Idea Factory |
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Sortie France
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9 mai 2023
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PEGI
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+7 ans
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| Web | Site officiel |
| Support de test | Nintendo Switch |
Royaume enchanté
Dokapon Kingdom est un titre qui, comme stipulé dans l’introduction, essaye de mêler deux genres : le RPG et le jeu de société. Un concept assez singulier chez nous, mais relativement commun au Japon. D’autres licences ont tenté le pari, avec plus ou moins de succès. Quid de Dokapon ? Le résultat est malheureusement bien mitigé.
Le titre dispose de deux modes : histoire et classique. Le premier vous permet de suivre une aventure plus ou moins mise en scène, le second de plonger dans le cœur de l’action en définissant une série de règles spécifiques (comme le nombre de tours). Quel que soit celui que vous décidez de sélectionner, le jeu débute par la création de votre personnage, ou de vos personnages si d’aventure l’envie vous prend de jouer à plusieurs (jusqu’à 4 sur une seule console, même en mode histoire). Et premier constat : le titre manque clairement de profondeur dans cette étape.
Seules trois classes sont disponibles : Guerrier, Mage et Voleur. Un choix basique, donc, mais qui n’en est pas vraiment un (je vous expliquerai ce point plus tard en détail). Libre à vous de jouer un homme ou une femme, puis de personnaliser via une couleur. Là encore, les possibilités sont restreintes au strict minimum.
Graphiquement, Dokapon Kingdom date bien d’un autre temps. Issu d’une ère où la 3D n’était pas encore celle que l’on connaît aujourd’hui, le jeu était déjà en retard lors de sa sortie initiale. Aujourd’hui, il est tout simplement laid.
Il ne s’agit ni plus ni moins que du portage du jeu Wii, sans la moindre petite amélioration, sinon un lissage relativement discret. Oui, le titre tourne en 720p
… mais n’attendez rien de plus.
Les modèles de personnages sont cubiques, le bestiaire manque de diversité et se montre digne de la première PlayStation. Rien ne semble visuellement indiquer que vous êtes devant un jeu Switch, tout au contraire même. Le manque d’environnements enlève de la profondeur à cette partie purement esthétique. En d’autres termes, Dokapon Kingdom se paye le luxe de paraître daté, même devant la majorité du catalogue Wii. Eh oui, je continue à parler de cette version « remastérisée » de 2023.
Une phase RPG basique
Une partie en mode histoire vous fera commencer sur un plateau de jeu relativement petit, sorte de tutoriel vous permettant de découvrir toutes les subtilités du gameplay. L’objectif est alors simple : rejoindre le château en moins de deux semaines. Une étape sympathique et amusante qui, malgré les défauts du jeu, est particulièrement attractive. Une première approche vraiment réussie… mais qui ne tarde pas à péricliter.
Car en effet, dès que vous atteignez le château, le vrai jeu débute. Et les problèmes commencent…
Votre mission est simple : sauver le royaume de Dokapon en parvenant à vaincre les monstres qui ont envahi les différentes villes alentour. Pour atteindre votre objectif, il vous faudra vous défaire des créatures de moindre envergure, récupérer de l’équipement et de l’argent… En bref, tout ce qui fait le sel d’un RPG des plus basiques. Malheureusement, il manque clairement de très nombreuses fonctionnalités pour en faire un RPG ne serait-ce que convenable… sans compter les défauts qui gâchent indubitablement l’expérience.
Commençons par les combats : s’ils se déroulent au tour par tour, ils se fondent sur un principe de « pierre-feuille-ciseaux » purement aléatoire… ce qui induit des affrontements interminables en cas d’échecs multiples.
Et ces fameux affrontements sont légion. Sur le plateau, un combat débute généralement si vous vous arrêtez sur une case dite « blanche »… et il y en a beaucoup.
Lors de ces derniers, les caractéristiques les plus importantes au début sont clairement la défense et l’attaque physique, soit les caractéristiques principales
du guerrier.
Et c’est là que le jeu se montre, surtout en multijoueur, particulièrement inéquitable : les magiciens n’ont pas de sorts initiaux ! Pour en débloquer, ces derniers doivent s’arrêter sur une case « livre de magie », et en obtenir un via une roue… aléatoire également.
Et tous les sorts ne se valent clairement pas. Ainsi, il n’est pas rare de jouer la plupart d’une partie sans jamais débloquer le moindre sort réellement utile, contraignant les magots à supporter un retard pratiquement impossible à rattraper sur les autres joueurs physiques.
Même le voleur, qui dispose d’une esquive vraiment plaisante, tape moins fort. De fait, les affrontements sont plus longs et, par corollaire, lui font perdre plus de temps.
Le guerrier dispose donc d’un avantage considérable durant un moment plus ou moins long, au point que le joueur finit par se demander pourquoi il choisirait une autre classe.
Autre problème : les différentes zones sont constituées de niveaux capés. Entendez par-là que le niveau de vos adversaires ne se calque pas sur le vôtre, mais s’avère prédéterminé par le jeu… et mal. Très mal.
Ainsi, la zone de départ du plateau est faible mais rapide à parcourir. Vous atteignez donc très vite les autres, dans lesquelles les monstres sont d’un niveau largement supérieur au vôtre.
En cas de défaite, votre personnage perd deux tours de jeu, le temps de se remettre. Passionnant donc, lorsque vous tombez pour la première fois dans ce traquenard sans queue ni tête.
Alors vous cherchez à comprendre. Peut-être le jeu vous incite-t-il par-là à emprunter une autre voie. Au lieu du nord, vous tentez le sud… pour le même résultat.
Vous réalisez alors avec horreur toute l’ampleur du désastre : pour progresser dans de bonnes conditions, vous êtes contraint de… tourner en boucle, tout en enchaînant des combats insipides afin de grinder. L’expérience et l’argent ainsi récoltés vous permettent, si vous êtes chanceux, de pouvoir débloquer de nouvelles compétences et armes indispensables à votre progression.
Car oui, le « génie » de Dokapon Kingdom tient également de son système de jeu de plateau totalement raté. Encore une fois…
Un mauvais jeu de société
Imaginez envisager quelques emplettes dans une des boutiques du jeu. Cette dernière est à trois cases de vous. Vous jetez le dé et faites 4. Magnifique ! Ah, non… puisqu’il faut absolument obtenir le score exact pour visiter le magasin. Si vous faites plus, vous passez simplement devant sans même avoir l’option pour vous y arrêter. Une idée totalement saugrenue, surtout que cette règle est également valable pour les objectifs principaux soumis à une limite temporelle.
Souvenez-vous de ce que je disais dans la partie précédente concernant le tutoriel : vous avez 14 jours pour rejoindre le château. À chaque tour de jeu, un jour défile. Donc, vous disposez de 14 jours pour atteindre cet objectif et vous arrêter EXACTEMENT sur la case dite « château » du plateau. Contrairement à la myriade de concurrents du titre, il n’est donc tout simplement pas possible d’envisager la moindre stratégie à long terme dans vos déplacements. Vous vous contentez de progresser au petit bonheur la chance, espérant un jet de dé clément.
En lien avec la section précédente, il est important de préciser pourquoi les séquences de combats sont si imbuvables. Afin de ne pas faire trop attendre les autres joueurs, les développeurs ont eu la merveilleuse idée de découper ces derniers en tours de jeu. Entendez par-là qu’en déclenchant un affrontement, chaque tour de combat consomme une phase de jeu complète, donc un jour…
Vous lancez le combat. Vous faites une attaque simple. Votre ennemi défend. Vous venez de perdre au « pierre-feuille-ciseaux ». Fin du tour. Vos amis jouent… puis vous revenez à votre combat. Vous lancez une attaque puissante. L’ennemi esquive. Rebelote. Troisième tour. Votre ennemi, d’un niveau considérablement plus élevé que le vôtre, attaque. Vous mourez en un coup. Vous perdez deux tours de jeu, le temps de vous remettre.
Voilà tout le sel qui s’agglomérera en vous, contraint et forcé de perdre pas moins d’une semaine complète pour simplement échouer lamentablement dans un seul et unique combat. La frustration atteint des sommets, surtout en considérant ces situations comme relativement communes.
Que dire de plus de cette partie « plateau » ? Les objets et événements sont totalement aléatoires, les boss trop puissants, les boutiques difficiles à atteindre… En bref, rien n’est réellement plaisant. Et pourtant…
Un jeu étonnamment addictif
Qu’on se le dise tout de suite : Dokapon Kingdom est indubitablement un jeu raté sur tous les plans. Et je n’ai même pas évoqué l’ensemble de ses défauts (menus impossibles à parcourir, sorts incompréhensibles, système d’évolution cassé, uniquement en anglais, etc.).
Pourtant, le fait est que vous et vos amis (ou l’I.A. si vous jouez seul) êtes
strictement soumis aux mêmes règles, ce qui rend le jeu… étrangement plaisant finalement. Car oui, tomber sur une case vous permettant de voler vos adversaires peut déclencher des moments de fou rire entre vous, de même que la gestion des villes que vous libérez, et qui vous permettent de gagner passivement de l’argent.
Au fur et à mesure des parties, on en vient étrangement à oublier tous ces points négatifs et à s’amuser, à vouloir aller plus loin, dans un véritable esprit compétitif. Très loin du fun immédiat que procure un Mario Party, par exemple, il n’est cependant pas destiné à toute la famille, mais seulement aux amateurs de parties interminables.







