Frankenstein ou le Prométhée moderne est un roman graphique de Sergio A. Sierra et Meritxell Ribas Puigmal qui paraîtra le 05 Février 2025 aux Éditions Aventuriers d’Ailleurs. Il se compose de 104 pages.

Classique gothique revisité

Ce roman graphique respecte fidèlement l’œuvre originale de Mary Shelley. Victor Frankenstein est un jeune homme issu d’une famille aisée qui supporte mal le décès de sa mère. Il développe une passion pour la mort qu’il essaie de comprendre et de maîtriser. Ses recherches l’amènent à créer la Créature, un amas de cadavres imbriqués ensemble, ressuscitée à l’aide de l’électricité.

Bouleversé par son acte, Victor abandonne la Créature à son sort et reste longuement alité. Son ami Henry l’aide à se rétablir. Victor garde son expérience secrète, il ne peut en parler à personne. Seulement, la Créature nourrit une rage meurtrière pour Victor, qui l’a rejeté après l’avoir créé.

 Lorsque Victor retourne voir sa famille, il apprend que son plus jeune frère, William, s’est fait assassiner. Il comprend que c’est la Créature qui a commis ce meurtre et a orchestré la condamnation de sa nourrice, Justine. En plaçant le médaillon de William sur elle, il la fait accuser, et Victor ne peut rien pour elle ; Justine finit pendue.

La Créature apprend seule comment imiter les Humains. Elle trouve refuge chez une famille au cœur bon, l’observe en secret. Mais tous les Humains sont les mêmes, aussi, le fils s’emporte, révulsé à sa vue. La Créature brûle leur demeure, sa haine ne fait que croître. C’est Victor Frankenstein qui l’a façonné ainsi, c’est lui qui lui a donné cette apparence hideuse qui fait fuir les mortels. Et c’est pourquoi il s’applique ensuite à détruire tous les proches de son maître, pour le faire souffrir… Il lui propose de mettre un terme à son carnage à la condition que Frankenstein lui fabrique une compagne pour partager son infortune. Victor accepte tout d’abord, mais sa moralité l’empêche d’aller jusqu’au bout et les conséquences seront dramatiques…

Carte à gratter

Graphiquement, Meritxell Ribas Puigmal utilise la technique de la carte à gratter. Elle consiste, à partir d’une base noire, à la gratter trait par trait pour créer de la lumière. Avant cela, des croquis préparatoires sont nécessaires. Puis elle ajoute des teintes bleues ou rouges, selon la planche et les émotions qu’elle véhicule.

La patte graphique est résolument gothique avec une ambiance sombre et feutrée. Le désespoir est palpable, la mélancolie exacerbée. Le noir, le blanc, le gris, le bleu et le rouge forment un mélange des plus singuliers qui confère à l’atmosphère un cachet fantasmagorique.

 À la fin de l’ouvrage, on retrouve les grandes lignes de l’histoire de Mary Wollstonecraft Shelley, marquée par de nombreuses tragédies. Sa mère, emportée par la fièvre puerpérale quand elle n’avait que 10 jours. La naissance prématurée de son premier enfant qui décède deux semaines plus tard. Puis sa demi-sœur ainsi que l’épouse de son amant se suicident. 2 autres enfants, Clara et William, meurent (soit 3 enfants perdus à seulement 22 ans), la plongeant dans une profonde dépression. Mary se raccroche à la naissance de son quatrième enfant pour lui redonner goût à la vie. Après la mort d’un bébé adopté prénommé Elena Adélaïde, Mary fait une fausse couche si violente qu’elle frôle la mort.

Son amant, Percy Bysshe Shelley, qu’elle a épousé après le suicide de son épouse, se noie en Italie. Une tumeur au cerveau emporte finalement Mary Shelley à l’âge de 53 ans.

 Mary Shelley a écrit Frankenstein à l’âge de 20 ans. L’influence du travail de Darwin a contribué à la rédaction de ce texte, mais également le deuil. La mort de son premier né lui a causé des visions effroyables. Et, jusqu’à la fin de sa vie, elle a pleuré tous ses enfants décédés. On peut percevoir une partie de cette détresse dans le personnage de Victor qui perd sa mère, puis bon nombre de ses proches.