Moody Rouge est un manga de Ariane Astier, paru aux éditions Casterman le 15 Janvier 2025. Il se compose de 200 pages.

En recherche d’identité

Ben est un enfant adopté. De terribles cauchemars qui paraissent réels viennent hanter ses nuits. Il se souvient encore de son père et de sa sœur, qu’il n’a pas revus depuis fort longtemps. Déterminé à retrouver son vrai père, même si ses parents adoptifs lui déconseillent fortement ; Ben retourne finalement en Allemagne. Ses pistes sont bien maigres, deux mois se succèdent aux côtés de Ronand, son meilleur ami, qui aimerait bien rentrer chez lui.

La télévision présente le peintre Eli Edel, qui expose ses toiles macabres dans l’église de Seltsamau (seltsame signifie bizarre en allemand). Ben n’y prête pas d’attention particulière au début, toutefois, cet homme semble lié à son histoire.

Ben poursuit son investigation, jusqu’à ce qu’il rencontre Adrian. Ce dernier agresse Ben et le poursuit au sein de l’église. Là-bas, il subit l’influence d’une présence, celle de la femme représentée sur l’un des tableaux d’Eli Edel : Agnetha, la sœur de Ben… Adrian, Ben et le peintre semblent reliés…

La monstruosité en soi

Ariane Astier a débuté dans le milieu du cinéma ; fille d’Alexandre Astier, elle est connue pour son rôle de Mehben dans Kaamelott.

On ressent dans Moody Rouge l’influence de Monster, que l’auteure a découvert très tôt, ainsi que les œuvres de Dario Argento, une éminence du giallo. Ce genre si particulier entremêle enquête, érotisme et horreur ; sublimé ici d’une patte graphique parfaitement maîtrisée. Ben, sur la couverture, fait penser à Johan Liebert. La passion de l’auteure pour l’art se distingue nettement : les planches sont de toute beauté, notamment 7 pages couleur dans le récit. Le trait, et particulièrement les visages, est magnifique, un travail d’orfèvre.

Concernant le scénario, on embarque très vite dedans en se demandant où ça mène. Toutefois, s’il y a des idées intéressantes, de nombreux points restent malheureusement obscurs. Que sont Ben, Agnetha et leur père au final ? Qui est leur mère ? Pourquoi Agnetha a légué un rein à son frère ? Pourquoi l’extraction des dents dans les années 70 (qui apparaissent ordinaires contrairement au plan dans l’enfance) ne l’empêche pas de disposer de dents pointues dans la suite du scénario ? Pourquoi cette protubérance à la suture ? Pourquoi Ilya avait déjà le blanc de l’œil droit rougi ? Était-il spécial avant sa rencontre avec Agnetha ? Comment a-t-il recouvré ses forces après sa dernière rencontre avec Adrian ? Beaucoup de questions demeurent sans réponses. La narration est quelque peu maladroite, ce qui perd parfois le lecteur dans la temporalité et la propre réalité des protagonistes. Une confusion qui dessert le récit, pourtant riche, à l’atmosphère macabre impactant. On perçoit une certaine poésie, juchée dans les entrailles de ce petit monde. J’aime tout particulièrement la poésie macabre qui entremêle horreur et beauté. Nul doute que les prochaines parutions d’Ariane Astier seront d’autant plus savoureuses.