Cette année 2023 débute sous les meilleurs auspices pour les amateurs de J-RPG. Dès le 19 Janvier arrivent en effet les versions Remaster de Persona 3 Portable et de Persona 4 Golden sur les consoles modernes. Cerise sur le gâteau pour les joueurs Xbox, ces dernières intègrent directement le Gamepass le jour de leur sortie. De quoi se replonger dans d’excellents jeux dans les meilleures conditions.
Initialement sorti en 2008 en Europe en exclusivité sur PlayStation 2 (et uniquement en anglais), puis en 2011 sur PlayStation Portable dans une version remastérisée ajoutant énormément de nouveautés ; celui que l’on nommera sobrement par son diminutif P3P a été une petite révolution dans la série de J-RPG signée Atlus.
Désormais entre mes mains pour un test complet de cette version ultime, pour la première fois intégralement localisée en français, il est l’heure de plonger dans les abîmes de l’âme humaine.
Comme la saga nous y a habitués depuis, vous jouez le rôle d’un héros (ou, pour la première fois de la série et j’y reviendrai plus tard, d’une héroïne) anonyme. Ce dernier est transféré au lycée Gekkoukan, situé dans une ville japonaise, quelque part sur le littoral.
À peine arrivé, il rencontre un étrange garçon qui lui demande de signer un contrat, puis ses premiers camarades. Très vite, son dortoir se fait attaquer par des entités maléfiques qu’il parvient à combattre grâce à un étrange pouvoir : celui de sa Persona.
Il rejoint alors la SEES (Escouade Spéciale Extrascolaire d’Exécution en français), uniquement composée de personnes capables de contrôler les Personae, afin de combattre ces Ombres invisibles aux yeux du plus grand nombre et qui n’apparaissent que durant la 25ème heure de la journée.
Par respect pour les lecteurs de ce test et plus particulièrement pour ceux intrigués par cet incontournable du J-RPG, je n’irai pas plus loin dans l’explication de l’histoire. Tout comme Persona 5 (et la grande majorité des jeux signés Atlus), cette dernière doit se découvrir intégralement, s’apprécier comme un bon vin millésimé.
Je me contenterai pour ce point précis de dire que le scénario de Persona 3 est sombre, diablement bien écrit, puissant et impactant. Comparable à celui du 5 ? Certainement, oui.
Rien que le fait que l’invocation desdites Personae se fasse par l’intermédiaire de l’Evoker, une sorte de pistolet que l’utilisateur doit actionner sur sa propre tempe, est une petite merveille d’inventivité et de sous-entendus : tout comme pour les masques de Persona 5, c’est au prix d’un sacrifice énorme (ndlr : un suicide) que les héros peuvent dépasser les limites de leur propre mortalité et véritablement développer leur plein potentiel.
Fort de sous-entendus, d’une richesse incroyable, et addictif au possible ; ce Persona 3 ne peut laisser personne indifférent quant à la qualité de son écriture. Les amateurs de J-RPG à l’ambiance sinistre seront comblés, et nul doute que les néophytes n’en sortiront pas indemnes.
Pour remettre le jeu dans son contexte de l’époque, il est important de rappeler que Persona 3 était en son temps une petite révolution dans la saga. Le passage à la génération PlayStation 2 s’est fait en douceur, ajoutant une dose rare de qualité.
Reprenant en partie les idées déjà développées dans le second opus, ce dernier propose pour la première fois une aventure réellement libre dans sa conception. Entendez par là que vous pouvez à loisir utiliser le temps diurne/nocturne pour vos activités du quotidien, renforcer vos relations avec les autres protagonistes, vous équiper, ou simplement en apprendre plus sur le lore général en visitant les lieux débloqués.
Une énorme partie “Visual Novel” a également été ajoutée au jeu, le rendant bien moins indigeste que son prédécesseur. Ici, point de succession de donjons, mais une véritable histoire dont chaque élément est raconté par l’intermédiaire de dialogues fort bien construits et agréables à suivre.
Bien entendu, le fait d’avoir tant insisté sur les relations entre les protagonistes a pour effet de les rendre plus attachants, plus concrets ; et de fait d’impliquer le joueur plus encore dans les événements tragiques qui s’ensuivent.
Côté gameplay, les amateurs se retrouveront en terrain connu. Que ce soit en termes de sorts, du système de résistances / faiblesses des ennemis ou de la progression du donjon labyrinthique, de fusion, etc… Refaire Persona 3 me rappelle combien la formule Atlus est rodée et n’a que peu évolué à travers le temps.

Dans le donjon justement, les protagonistes sont visibles et se suivent, permettant d’interagir avec eux à loisir. Le level design de ce dernier est cependant assez anecdotique et reprend la structure de tous les jeux de la firme. Les amateurs seront conquis, les détracteurs déçus.
Eh oui, j’indique bien “le” donjon au singulier. Contrairement aux jeux suivants, Persona 3 dirige l’ensemble de son exploration autour d’un seul et même donjon : le Tartare, une immense tour que l’on parcourt en boucle jusqu’à la toute fin.
Découpée en paliers amenant des décors quelque peu différents, chaque niveau se renouvelle intégralement à chaque visite. Autrement dit, à la manière d’un Rogue-Like, chaque nouvelle entrée apporte son lot d’ennemis et d’objets à récupérer.
Bien entendu, des points de téléportation réguliers vous permettent de ne pas avoir à recommencer l’ensemble de votre ascension à chaque visite.
Si le choix d’adapter la version “Portable” de Persona 3 peut faire sourire les néophytes, les fanboys en seront conquis.
En effet, comme dans la plupart des épisodes de la série, Persona 3 est sorti dans trois versions différentes : l’initiale, FES et P3P. La dernière, ici proposée, est indubitablement la plus complète et apporte énormément de nouveautés à mettre au crédit du titre (c’est un peu la version “Royal” de Persona 5).
On retrouve donc au programme, en sus de l’aventure principale, les améliorations notables de FES : de nouvelles Personae, des ajustements dans les compétences, de nouveaux trésors et objets, des vidéos, un personnage jouable en plus, un approfondissement des liens sociaux, plusieurs quêtes inédites, des costumes, ainsi qu’un mode de difficulté supplémentaire : difficile.
De la version Portable découle un nouveau protagoniste principal féminin. Vous avez donc tout le loisir de le sélectionner dès le lancement du jeu. Choix que je vous déconseille cependant, la demoiselle ayant une difficulté plus relevée que son confrère, de nouveaux embranchements scénaristiques ainsi que des liens avec l’intrigue qui ne peuvent être réellement appréciés qu’au prisme d’une première lecture.
Maintenant que j’ai encensé le jeu comme il le mérite, il est temps de se pencher sur cette adaptation aux consoles modernes. Vaut-elle réellement le coup ? Eh bien… la réponse est toute en nuances.
Déjà, remettons l’église au milieu du village : on est ici devant un portage. Il ne s’agit ni d’un remake, ni d’un remaster. La version que j’ai entre les mains est en tous points identique à celle sortie sur PlayStation Portable, avec quelques ajouts fort appréciables… et des manques notables.
Débutons par ce qui est le plus visible (et important) : la localisation. Pour la première fois, je peux découvrir Persona 3 en français. Et cette traduction est digne du titre. Extrêmement bien réalisée, elle parvient sans faillir à conserver l’essence du jeu d’origine tout en l’adaptant à ma langue. Quelques soucis viennent cependant entacher le plaisir : des fautes d’orthographe assez anecdotiques et peu nombreuses mais, surtout, de gros soucis de “genre”. Pour expliciter ce dernier point, il n’est pas rare que les protagonistes féminins aient droit à des textes… au masculin. Y compris pour l’héroïne.
La taille des sous-titres est, comme à l’époque, également vraiment appréciable. À ce niveau-là, c’est un sans-faute absolu qui devrait servir de leçon à bien des jeux modernes.
Plusieurs améliorations de confort de jouabilité sont également de la partie. Ainsi, les déplacements des personnages et la navigation ont clairement été optimisés pour mon plus grand plaisir. De même, il est désormais possible de choisir entre le doublage anglais ou japonais.
Malheureusement, ces nouveautés sont également en demi-teinte. L’amélioration de fluidité par exemple est une simple augmentation de la vitesse globale… y compris des ennemis. Ces derniers peuvent donc vous foncer dessus comme l’éclair alors même que vous déclenchez votre attaque, vous empêchant d’obtenir la priorité lors des affrontements. À l’identique, lorsque ces derniers s’enfuient, leur animation semble épileptique…
Enfin, cette version dispose d’une option de sauvegarde rapide, vraiment indispensable lors de vos explorations, les points de sauvegarde étant assez peu nombreux.
En bref, tout est parfait ? Eh bien… pas vraiment. Persona 3 Portable est un jeu qui accuse son grand âge. Visuellement totalement dépassé, techniquement très en retard, il est, de plus, littéralement le portage du jeu PsP comme je l’ai indiqué tantôt.
Entendez par là qu’à l’époque, la version Portable de Persona 3 était indubitablement la moins réussie des trois, retirant bon nombre de vidéos, compressant les images et les cinématiques, souffrant d’un aliasing omniprésent et amputant le contenu d’un énorme DLC disponible uniquement dans la version FES.
Les améliorations de cette version sont notables, c’est indubitable. On est très loin de la bouillie proposée à l’époque. Cependant, le titre souffre toujours de lourds problèmes visuels, notamment sur les cinématiques. Bien des textures sont pixélisées et l’upscale est parfois maladroit.
Loin d’être rebutant, il est certain cependant que son côté “old school” et ses soucis graphiques bloqueront bon nombre de joueurs dans leur découverte de ce titre pourtant excellent.