Dans un paysage vidéoludique dominé par les mondes ouverts et les jeux de tir multijoueurs, rares sont les titres qui osent revisiter le genre de la stratégie en combinant des mécaniques novatrices. Songs of Silence propose un mélange audacieux de 4X, de gestion de héros, de batailles en temps réel et de mécaniques de deck-building. Cette fusion, aussi risquée qu’ambitieuse, parvient-elle à créer une expérience mémorable ou sombre-t-elle dans la cacophonie ludique ?

Un monde au bord du silence

Dès les premières heures de jeu, Songs of Silence pose un univers sombre et envoûtant où le destin de deux mondes interdépendants est menacé par une force surnaturelle connue sous le nom de « Silence ». Ces deux royaumes, bien que très différents dans leurs cultures et croyances, sont liés par un destin tragique : soit ils s’unissent pour lutter contre cette menace inexorable, soit ils sombrent dans l’oubli.

L’intrigue principale suit plusieurs héros issus de ces mondes. Chacun est façonné par son passé et ses ambitions, qu’il s’agisse de défendre son peuple ou d’exploiter la guerre à des fins personnelles. Les dialogues, riches en détails et en sous-entendus, permettent d’approfondir les motivations de ces personnages qui ne se résument jamais à de simples archétypes.

L’univers narratif, bien que teinté de clichés propres à la fantasy épique, parvient à se démarquer grâce à des arcs narratifs soigneusement écrits et à des choix de dialogues aux conséquences réelles. Certaines décisions changent le cours de l’histoire, influençant la destinée de personnages clés ou modifiant l’équilibre des forces en présence. Cette approche interactive donne une véritable saveur de RPG au jeu, même si son cœur reste fermement ancré dans le genre de la stratégie.

Une mécanique stratégique sur plusieurs tempos

Songs of Silence se joue en deux phases distinctes mais intimement liées. La première consiste en une exploration à l’échelle stratégique, où le joueur navigue sur une carte sans grille, à la manière d’un jeu de gestion en temps réel. Chaque région est remplie de points d’intérêt, de ressources à exploiter et de territoires ennemis à conquérir.

La gestion des ressources repose sur un système simplifié mais efficace. Les principales ressources à collecter sont l’or, le mana et les cristaux d’invocation, chacune ayant un rôle déterminant dans la gestion des armées et le déploiement des héros. Cette approche permet de maintenir un rythme soutenu sans sombrer dans la micro-gestion fastidieuse qui caractérise souvent les jeux de stratégie plus complexes.

La liberté de mouvement est appréciable, mais elle s’accompagne d’une légère confusion dans la gestion des unités. Les déplacements sur la carte ne suivent pas de schéma clair et peuvent devenir difficiles à anticiper dans des batailles massives. Cela demande une période d’adaptation, bien que les joueurs chevronnés en stratégie ne tarderont pas à en saisir les subtilités.

Les batailles se déroulent en temps réel, combinant un système d’auto-battler et des combats influencés par des cartes stratégiques. Chaque affrontement commence par un déploiement tactique où le joueur doit positionner ses unités en fonction de la configuration du terrain et du type d’ennemis rencontrés.

Une fois la bataille engagée, les unités se déplacent automatiquement et attaquent selon leurs caractéristiques. Le joueur peut toutefois influencer le cours des combats en utilisant des cartes spéciales tirées de son deck. Ces cartes permettent de lancer des sorts dévastateurs, de renforcer des troupes ou de perturber les lignes ennemies.

Cette approche hybride fonctionne généralement bien, même si elle peut frustrer les puristes du genre, habitués à des systèmes de commandement plus directs. Le succès repose davantage sur une bonne préparation stratégique en amont que sur des décisions tactiques en temps réel.

Un univers visuel qui chante la lumière et l’ombre

Visuellement, Songs of Silence est un véritable tableau vivant. La direction artistique s’inspire clairement de l’Art Nouveau et des peintures symbolistes, donnant à chaque écran une identité forte et mémorable. Les couleurs vibrantes et les designs détaillés créent des environnements enchanteurs qui captivent le regard dès les premières minutes de jeu.

Les personnages, qu’il s’agisse des héros ou des unités de combat, sont magnifiquement animés. Chaque faction possède son esthétique propre, oscillant entre le mystique et le baroque, renforçant l’impression de voyager dans un monde de légendes oubliées.

Cependant, certains aspects techniques mériteraient d’être affinés. Les animations, bien que fluides, manquent parfois de variété, notamment lors des batailles de grande envergure. De plus, certaines textures environnementales perdent en détail lorsqu’elles sont observées de près, ce qui contraste avec l’impression de perfection visuelle dégagée lors des cinématiques.

L’un des aspects les plus mémorables de Songs of Silence est sans aucun doute sa bande-son magistrale, composée par Hitoshi Sakimoto, célèbre pour ses travaux sur des titres comme Final Fantasy Tactics. Chaque morceau accompagne parfaitement l’atmosphère générale, oscillant entre mélodies envoûtantes et thèmes guerriers épiques.

Les sons environnementaux sont tout aussi immersifs. On entend les bruissements des feuilles dans les forêts enchantées, le fracas des épées sur le champ de bataille et les murmures inquiétants du « Silence » qui s’approche inexorablement. Les doublages sont limités mais bien interprétés, ajoutant de la gravité aux moments clés de l’histoire sans jamais surcharger le récit.

J’aime

L

Une direction artistique inoubliable et inspirée.

L

Une bande-son magistrale de Hitoshi Sakimoto.

L

Un système de jeu stratégique innovant et accessible.

J’aime moins

K

Des performances techniques inégales.

K

Un manque de profondeur dans la gestion des ressources.

K

Des mécaniques de combat parfois trop passives.